Depuis que l’allemand m’avait parlé de langouste j’étais tiraillé par l’idée d’en déguster une. Mais à Cuba, comme tout est commerce de proximité, il faut être au bord de la mer pour trouver des langoustes. J’ai donc décidé de me rallonger de 50kms pour y goûter. Je pars tôt, comme d’habitude et je roule en direction de Banes. La route est d’abord très belle puis se dégrade pour avoir quelques passages en terre. Puis près de Banes, les collines commencent, jusqu’à la mer. Je croise un cycliste cubain et échange quelques minutes avec lui, puis j’arrive à la mer. Je trouve facilement un paladar qui cuisine le fameux crustacé. Après avoir englouti la bête je repars et suis le bord de mer. Je tombe alors sur German, mon ami taxi avec qui nous avions traversé pour la première fois l’île. Nous discutons un bon moment. Je lui raconte mon périple, il me parle de son auto. Enfin je reprends la route où je rejoins Holguin.
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2017 – Jour 8 – Guantanamo – Mayari
Originalement, je voulais passer par Mayari Arriba (en haut des crêtes), et descendre par un chemin de terre jusqu’à Mayari. Cependant sachant que ça traverse une zone semi-militaire, j’ai préféré afin de ne pas me retrouver à devoir rebrousser chemin, passer par la route habituelle. Les informations que j’avais étaient qu’il y avait de la montée, mais j’ai été surpris par environ 25-30 kms de chemin de terre. De plus, ma mamie de Guantanamo m’avait mis ma bouteille à congeler, et elle était percée. Quand je m’en suis rendu compte il était trop tard, j’ai donc traversé toutes les montagnes sur une petite bouteille d’eau, en économisant entre chaque possibilité de la remplir. Le soleil s’est ensuite mis de la partie, mais comme ils disent « Con calma llega » (lentement on arrive), j’ai rejoint Mayari le soir et trouvé une casa tenue par deux docteurs dont les signes de richesse étaient assez évidents. Rien de palpitant en chemin en dehors d’un arrêt impromptu chez quelqu’un pour lui demander quelque chose à manger et une visite de sa plantation de bananes et de café.
2017 – Jour 7 – Retour à Guantanamo
J’ai hésité longtemps avant de décider si je rentrais par la route du sud ou si je repassais par Moa comme l’an dernier. La route vers Moa est belle pendant une vingtaine de kilomètres où alternent asphalte détruit et chemin boueux, mais traverse ensuite une zone aride presque désertique et le chemin est cahoteux. Je préférais donc refaire un peu de montagne en remontant la Farola et retourner voir la mamie qui tient la casa où je logeait à Guantanamo. Une sacré femme avec un caractère bien latin qui me rappelait parfois les amis de ma grand-mère. Voilà donc une étape un peu longue, mais avec des conditions de route parfaites. En montant je remplis mes bouteilles dans les source, puis dans la descente un peu après Alto de Cotilla, voilà que je vois un homme avec un grand chapeau de paille poussant son vélo. C’était mon allemand qui s’en allait vers Baracoa après avoir passé une nuit chez mon ami Jose. Il me raconte qu’il a aussi passé du temps au village et qu’il y a laissé du linge de des pesos, se sentant un peu désemparé devant la situation des villageois. Je reprends ensuite la route et je roule rondement, le vent dans le dos jusqu’à Guantanamo, non sans m’arrêter prendre un verre et me faire draguer avant de quitter le littoral. Je rejoins facilement Guantanamo.
2017 – Jour 6 – Déambulation autour de Baracoa
Baracoa elle même a été plutôt bien reconstruite suite au passage de Matthew. Quelqu’un qui ne saurait pas que c’est arrivé ne pourrait se douter de rien. Quelques ruines ornent bien sûr le Malecon, mais on trouve des ruines dans toutes les villes cubaines, donc ça ne semble pas vraiment anormal. J’ai voulu aller jusqu’au Rio Toa, celui qui sortant de son lit a emporté le seul pont qui permette d’aller vers l’Ouest jusqu’à Moa. La végétation est (était) luxuriante. Je sors tranquillement de la ville en passant devant la fabrica de chocolate Che Guevara puis me promène. Après quelques dizaines de minutes, j’arrive finalement au Toa. Le pont n’est plus là bien sûr, mais ils ont construit un oassage bétonné qui permet de traverser sans difficultés et sans se mouiller les pieds. Je traverse la rivière et rejoins le village sur l’autre rive. C’est la sortie de l’école. Je m’asseois dans une de ces cabanes qui servent à attendre un transport et suis rapidement rejoint par des écoliers d’une dizaine d’années.
« Where are you from » me demande un garçon. J’entre dans son jeu et lui réponds en anglais. Évidemment, il ne comprend pas, mais une gamine elle comprend et enchaîne avec un « What is your name ». Rapidement nous passons à l’espagnol et ils me demandent de leur parler de mon pays. Il me demandent si ma maison est grande, si j’ai une douche. Je leur montre des photos du Québec, puis de la neige. À ce moment la gamine m’interroge et veut savoir comment c’est la neige quand elle tombe. J’essaye de lui expliquer, amusé par la question. Elle demande ensuite si on se déplace en traineau comme le père noel.
Après quelques dizaines de minutes, je repars en direction de Baracoa, et prends un petit chemin sur la gauche qui m’amène à la plage. Une belle plage de sable noir ou il n’y a que moi. Immédiatement une gamine arrive pour tenter de me vendre des choses. Elle parle un espagnol clair, lentement pour s’assurer que je comprenne. Elle finit par faire sa vente. Je me baigne, puis vais jusqu’à la rivière prochaine (Duaba) en passant devant des maisons complètement détruites. Au bord de l’eau, deux femmes sont en train de laver leur linge et de l’étendre au soleil. Moi j’en profite pour nettoyer rapidement ma monture. Je retourne sur mes pas, et quand j’arrive à la maison de la fillette, ses parents sont là. Ils me saluent, et me racontent que leur maison était un peu plus loin, dans le marais. Elle a été détruite, et après les larmes, ils se reprennent ici, dans une maison plus grande et somme toute coquette, même si elle est en bois. Ils ont 5 enfants et me disent de passer les voir si je reviens.
2017 – Jour 5 – Camion jusqu’à La Machina puis Maisi – Baracoa
En étant refoulé à Palenque, mes plans ont été pour le moins chamboulés. Je voulais à l’origine faire l’itinéraire actuel dans la direction inverse et je n’avais pas vraiment envie de repasser à Moa. Force est de croire que je vais y être contraint, mais bon. Aujourd’hui mon périple m’a amené dans la zone la plus orientale de l’île, celle décimée par l’ouragan Matthew en Octobre. On m’a offert un transport en camion jusqu’à La Machina dont j’ai profité évitant ainsi certaines côtes vertigineuses, et me permettant d’arriver un jour plus tôt à Baracoa. La route en état moyen serpente de montées en descentes vertigineuses au milieu de palmiers dévastés. L’ouragan a fait ici ce que les compagnies forestières font en cachette chez nous. Un sentiment étrange m’a habité toute la journée. Une certaine compassion pour ces gens qui ont perdu pour la plupart leurs toits (remplacés par ailleurs en presque totalité par le gouvernement) et l’impuissance de n’être que témoin devant cette catastrophe.
Suite au passage de l’ouragan, le gouvernement a décidé d’investir dans la région pour en développer le potentiel touristique. Ils ont construit un campismo près du phare et sont en train de refaire une partie de la route entre Baracoa et Maisi pour supprimer un passage d’une pente inchiffrable, mais impossible à monter en vélo (je l’ai descendue). C’est plutôt une bonne nouvelle pour la région qui va avoir besoin de quelques années pour se remettre debout.
J’aurais dû être à Guantanamo ce soir au lieu de Baracoa pour prendre une pause. Je vais la prendre ici, même si Baracoa est une ville très touristique et où l’authenticité cubaine cède le pas à la possibilité de m’extirper quelques pesos. J’ai besoin de me reposer avant de repartir.
2017 – Jour 4 – Guantanamo – Cajo Babo
Première journée de contact avec les dégâts de l’ouragan, cette journée de seulement 100km je la prends tranquillement. En sortant de Guantanamo je croise de nombreuses personnes en vélo avec d’immenses sacs d’herbe qui retournent vers la ville. J’en croque deux et je continue mon chemin. Cette route à l’asphalte parfait longe la côte. Je roule jusqu’à San Antonio del Sur où je retourne voir mon ami Javier. De grandes accolades, de la joie. Toute la famille est contente de revoir le Yuma. Aussitôt arrivé, on me sert un potage avec du riz, sans même me demander si j’ai faim. L’accueil cubain dans sa splendeur. Je sors du chocolat et on passe un bon moment ensemble. Il me dit que je dois revenir avec Ariane et qu’on tuera un porcinet pour le manger rôti, et il insiste! Je reprends la route en direction de Cajo Babo, là où l’oeil du cyclone est passé. Je suis toujours dans l’attente de voir l’état de la maison de mon ami, qui est à seulement 100 mètres de la plage. Sur les bords de la route, les palmiers sont déracinés, au croisement des rivières, on voit tout ce que l’ouragan a déversé et qui est descendu de la montagne. Finalement j’arrive chez mon ami, et la famille est là. À nouveau des accolades. Je suis bien heureux de les retrouver. Leur maison a souffert (ils on perdu le deuxième étage), mais est encore là. On passe la fin de la journée à placoter et à regarder des photos. Je passe ensuite la nuit dans mon hammac.
2017 – Jour 3 – Palenque de Yateras – Baracoa devenu Palenque – Guantanamo
Sachant qu’une longue journée de chemins rocailleux et boueux m’attendait, je me suis levé avant 6h pour prendre le chemin avec un soleil levant et avoir le temps de pal
lier à des imprévus en chemin. La « Via Mulata » qui relie Palenque à l’embouchure de la rivière Toa n’est pas sur toutes les cartes et ça promettait d’être spectaculaire.
Distance et dénivelé similaire à hier. Malheureusement, après un peu plus de 7kms, un homme se met en travers du chemin et me demande mes papiers. Il me dit que c’est u
ne zone surveillée et qu’il est interdit d’y passer. Il me demande de le suivre dans sa cabane m’intime de m’asseoir et appelle au central. Il me dit qu’il y a une loi d
e l’immigration qui interdit le passage. Étrange Cuba. Ensuite il me dit que je dois retourner à Palenque au poste de police pour un contrôle et que je devrais repartir
dans l’autre direction. Que lui va prendre un camion. Je lui dit que je veux monter dans le camion avec lui et nous retournons au village.
Au poste de police, se succèdent plusieurs personnes en uniforme, mon policier fait des appels à l’immigration, vérifie les photos que j’ai faites, et voit bien que rien
n’est anormal. Étonnament il ne me demande pas où j’ai dormi, mais s’informe pour savoir si j’avais ramassé une motte de terre. Finalement je crois qu’il s’est rendu co
mpte que je pouvais passer, mais pour ne pas perdre la face il m’a dit que Matthew avait fait trop de dégâts pour pouvoir passer et que c’était impossible. Plus aucune m
ention de l’immigration.
Bref, j’ai du modifier mes plans, et je suis reparti en direction de Guantanamo, en gravissant une montée bétonnée interminable. Je me suis vite trouvé une casa de touri
stes et j’ai pu me rappeler à quel point avoir une douche est un luxe dont on ne peut se passer. 😉
Je vais probablement aller en direction de Baracoa demain, mais l’idée de repasser par Moa pour rentrer ne m’enchante pas vraiment. Je me donne l’après midi pour décider
ce que je vais faire.
2017 – Jour 2 – Cayo Mambi – Palenque de Yateras
Je sais que cette deuxième journée sera difficile. Au programme beaucoup de montées, et surtout la moitié du chemin sur des routes qui ne sont accessibles qu’en Jeep. Fidèle à moi-même, j’ai légèrement sous-estimé la difficulté.
Je pars d’abord le ventre vide jusqu’à Sagua à 10kms. Je cherche une cafétéria et je finis par trouver une vendeuse de sandwiches. J’en avale deux, je lui fais remplir mes gourdes, et je me dirige vers la route de Guantanamo. Dès le début, la route est en mauvais état et très rapidement les montées s’enchaînent. Aucun véhicule de tourisme ne me croise ou double, ce qui me met la puce à l’oreille et annonce le reste de la journée. La nature est incroyable de beauté. La forêt tropicale et les cultures alternent et rafraîchissent l’air. Et moi je monte. Je monte. À un moment quelqu’un me demande si je vais à Guantanamo, et quand je lui dis ma destination il devient incrédule. Je m’entête et je monte. Je monte. Après un bon moment, je finis par rejoindre l’intersection avec la route des crêtes. Un homme me vend un sandwiche et un refresco maison et je suis parti. Fini l’asphalte. Ça descend enfin, pendant quelques centaines de mètres avant de reprendre en montée. À Cuba, quand une montée est en ciment, tu sais que tu vas passer un mauvais quart d’heure. Je croise ensuite un homme à cheval. Il me demande où je vais et me dit qu’il n’y a pas de chemin. Il est encore tôt, alors je fais fi de ses conseils, et je monte. Je monte. Quand ça descend, on ne peut même pas en profiter tellement le chemin est défoncé.
Au bout d’une quinzaine de kms de vallons raides, j’arrive sur un plateau. Les gens que je croise ou à qui je demande de l’eau ne sont plus incrédules mais admiratifs. Le chemin serpente entre les butes, au milieu de la forêt. Le vent en haut (750m) est très fort et parfois me déstabilise mais je continue vaillament. Dans un des villages je cherche à manger et me fais servir une sorte de soupe pour laquelle il ne fallait pas avoir l’estomac fragile. Je l’ai avalée sans rechigner.
Finalement je suis arrivé à Palenque de Yateras. Palenque en cubain signifie à peu près : endroit lointain et difficile d’accès où les esclaves se cachaient. C’est un village où les faciès des gens rappellent leur origines indigènes. Les cubains les appellent même les « indios » comme ils disent les « mulatos » ou les « negros ».
Je passe la nuit dans une casa, probablement illégale, avec douche au gobelet pour faire changement et coupure d’électricité.
2017 – Jour 1 (ou 9) Holguin – Cayo Mambi
Après avoir déposé Ariane à l’aéroport à bord d’une rutilante Peugeot 404, j’ai déambulé à la Noche Holguinera en observant le monde et en me rappelant nos souvenirs de voyage en famille en passant devant la machine à Barbapapa. Puisqu’il fallait que je décolle au lever du soleil, je n’y suis pas resté longtemps. Rentré à la casa, j’ai préparé mes sacoches pour être prêt. Le voyage cette année est un voyage ou je prévois explorer les coins un peu plus reculés. Sans asphalte, et sans touristes. Je veux aller dans les montagnes de la province de Guantanamo, celles qui ont été atteintes par l’ouragan Matthew cet automne. J’ai décidé d’y commencer mon ascension par la route etre Sagua de Tanamo et Guantanamo, donc cette première journée m’amènera jusqu’à Cayo Mambi, à 10 kms de Sagua.
Je connais bien cette route pour l’avoir prise plusieurs fois. On y a un souvenir familial à Caballeria, où, comme à beaucoup d’intersections de route, il y a quelques petites tiendas qui vendent des sandwiches ou de la bière. Le jour où nous y sommes allés en famille, il n’y avait plus de boissons sans alcool car le frigo était tombé en panne, mais il y avait plein de bières puisque le frigo des bières, bien qu’à moitié vide, lui fonctionnait. Une de ces abérations cubaines auxquelles il faut se faire.
La route est vallonnée jusqu’à la région de Cueto, puis on entre dans une vallée de production de canne à sucre. Quelques maisons au style Nouvelle Orléans nous rappellent les temps où l’industrie de la canne était aux mains des américains. On longe ensuite une retenue d’eau puis on arrive à Mayari. Petite ville au pieds des montagnes. Collation, remplissage des bouteilles, et je repars.
Immédiatement la luxuriance du paysage apparaît. Palmiers, bananiers et autres arbres tropicaux agrémentent le chemin. Un contraste frappant quand on sait à quel point les mines dont la canadienne Cherrit on détruit le paysage autour de Moa. Je roule à un bon rythme jusqu’à Cayo Mambi, achetant quelques mandarines en route.
Je me fais rapidement aborder par un gars qui me propose sa casa pour la nuit. Une maison sans eau courante, donc me revoilà avec une douche au gobelet. La soirée est courte. Je trouve une assiette de porc misérable et finis avec une barre de céréales.
Jour 14 – Retour à la réalité
C’est toujours un choc quand on rentre à l’aéroport après avoir passé deux semaines hors des sentiers battus. Ça me remue tellement que je n’en ai pas fait de photos. Au bout d’une allée bordée de palmiers se trouve le bâtiment. En face, des autobus de touristes facilement reconnaissables car ce sont les seuls autobus de luxe de l’île ont déjà déversé leur flot de gens rassasiés et grillés après une semaine aux petits soins dans ce paradis terrestre. Comme on est à Cuba, il n‘y a que deux comptoirs pour s’enregistrer et la queue est interminable.
C’est là que le français en moi, affublé du sobriquet de chialeux dont j’ai hérité par magie de mes compatriotes se bidonne bien. Les touristes se retrouvent soudain face à la réalité, même édulcorée, de la bureaucratie cubaine et deviennent les champions du monde de la critique et de l’arrogance. Difficile, après une semaine où tout le monde est à tes pieds, de trouver des toilettes puantes pour lesquelles il faut payer et qui n’ont pas de porte qui barre. Difficile de ne pas pouvoir faire ses courses au hors taxes parce que la carte de crédit n’est pas fonctionnelle aujourd’hui. Mañana la tarjeta. Difficile de devoir payer pour un hot dog sans saveur. Bref, un moment de divertissement doux amer qui force la réflexion sur la planète dans laquelle nous vivons.
Ce voyage de deux semaines dans la vie cubaine a été d’une intensité sans pareil. J’ai pu plonger dans une réalité dont une grande partie m’échappe encore. Je suis en admiration devant la façon dont les cubains luttent chaque jour pour remplir leur assiette, et celle des autres si quelqu’un vient à passer. Ces moments que j’ai partagé avec vous, et d’autres que je n’ai pas pu dévoiler ou que je n’ai pas pris le temps de raconter auront sans doute un impact important sur ma vie. Difficile dans leur peau de faire confiance à l’avenir. L’incertitude quant à la succession du régime, l’impossibilité d’envisager l’avenir de façon optimiste quand ils voient la lenteur des changements, la difficulté constante à obtenir des produits de première nécessité, l’imprévisibilité des forces de l’ordre.
Un endroit plein de mystères où nous avons la chance de ne pas être né.
Je voulais aussi remercier tous ceux qui m’ont suivi dans cette aventure et qui ont commenté mes publications. Je suis chanceux de vous avoir comme amis. Finalement, ceci ne serait pas possible sans la confiance et l’amour de ma chérie que je suis bien content de retrouver!
Je posterai peut-être d’autres anecdotes d’ici les prochains jours, mais le mieux serait de se voir pour en jaser. Rien ne vaut un bon vieux contact humain! (tous les chialeux français sont aussi invités à la maison).
Adios amigos!
Jour 12-13 – Holguin – Gibara – Playa la Herradura – Velazco – Holguin
La Playa la Herradura est un endroit à Cuba où il est étonnant qu’il n’y ait pas encore d’hôtel. C’est une plage prisée par les cubains, une petite baie sablonneuse avec la mer qui entre et sort dans le village au gré des marées. Un endroit d’une grande quiétude, à l’abri de la foule. Nous y étions allé l’an dernier et j’ai voulu y repasser.
Cependant afin de mettre un peu de piquant dans l’aventure, je suis passé par Gibara, puis j’ai longé la côte jusqu’à Playa Caletones. La route y est en corail concassé et tout se passe bien. J’ai croisé un pêcheur de requins qui tue ses proies au couteau, puis à Caletones un belge flamand installé là depuis quelques années.
C’est quand on repart vers le sud que ça se gâte. Le chemin devient de plus en plus boueux et finit par être quasiment impraticable pendant plusieurs kilomètres. Il débouche ensuite sur un village où visiblement les étrangers y sont étranges car jamais présents. Enfin, après quelques kilomètres on rejoint la route qui mène à La Herradura. Expérience difficile de boue et de solitude.
Passé un après midi relaxe à la Herradura, regardé un film sur mon téléphone, mangé comme un roi, et le lendemain retour tranquille jusqu’à Holguin pour préparer mon vélo.
Jour 10 – Moa – Holguin – 190kms dont 130 sous la pluie
Ce matin en me levant dans ma ville dortoir, il pleuvait des cordes. Inimaginable de rester là une journée de plus. Je suis donc parti sous la pluie avec en tête d’aller jusqu’à Holguin, près de 190kms plus loin. J’ai fait 130kms avant qu’elle arrête de tomber. Un long moment grisant léché par la douceur de la température et le bruit des pneus sur l’asphalte. Il faut cependant bien fermer la bouche particulièrement dans les descentes pour ne pas avaler de coliformes.
Cuba est tout de même un pays étrange. En route aujourd’hui je me suis arrêté à Cueto. J’aurais pris un refresco ou même une cerveza mais le frigo pour les boissons en cannettes était en panne donc rien de frais sauf de l’eau ou du jus car l’autre réfrigérateur, à moitié vide, lui fonctionnait. Dans n’importe quel pays ailleurs la serveuse se serait fait virer mais ici c’est simplement normal. Un des côtés désagréable du communisme ou l’efficacité n’est pas un critère.
Jour 9 – Baracoa – Moa / Mud Fest!
Aujourd´hui je me suis arrete a Moa. C´est mon velo qui m´a dit stop. Suis parti sous la pluie et les averses ont dure un bon moment. Apres 6 kilometres et pour les 40 kms suivants, le chemin devient une pìste de terre et de boue. J´ai des photos, mais impossible de les charger ici. Je me suis bien amuse, mais la mecanique a souffert. Il a vraiment fallu que je m´arrete pour entretenir le velo. J´ai aussi une sacoche qui montre des signes de faiblesse.
Moa est une ville miniere, on y produit du nickel. Le principal employeur de la ville est une co entreprise du gouvernement cubain et d´une compagnie canadienne dont je ne connais pas le nom. Quand je vois l´etat general de la ville, les conditions de vie des gens qui y vivent, j´ai pas mal honte d´etre canadien. Cette entreprise dont je trouverai le nom est indigne. Il n´y a pas de centre ville. Seulement des centaines d´immeubles delabres.
Demain je continue vers l´ouest, et je ne sais pas encore ou je vais m´arreter. Si j´ai une meilleure connexion, je vous mettrai des photos. La je suis dans un hotel sur un pc en 1024×768 avec Windows XP et un Kapersky version d´essai expire!
Jour 8 – San Antonio del Sur – Cajo Babo – Baracoa
De San Antonio del Sur à Baracoa, il faut monter la fameuse Farola. Une route de montagne qui serpente dans la forêt tropicale. Mais avant la Farola, il y a Cajo Babo. Un petit village où nous avions passé une nuit au Campismo l’an dernier et où nous avions fait connaissance de la famille de Jose l’an dernier. Le jeune avait emmené les enfants dans la campagne pour chercher du miel en enfumant les abeilles. Ils avaient aussi fait des concours pour monter aux cocotiers. De très bons souvenirs, alors il était impossible de passer à Cajo Babo sans s’y arrêter.
Tout de suite, ils m’ont servi un déjeûner et accueilli comme un membre de la famille. Daniel, le fils travaille maintenant comme boulanger stagiaire. Il gagne un gros 90 pesos cubains par mois (environ 4$) et aura un salaire de 300 pesos à la fin de son stage. Il prépare 2000 pains tous les jours. C’est un gamin vraiment vivant et intéressant qui mériterait mieux.
Après m’être restauré, j’ai quitté la famille pour faire l’ascension. C’était plus facile que prévu. Je me suis arrêté à de nombreux endroits, et particulièrement dans les virages de la montée où se trouvent des vendeurs de chocolat, pâte de coco, et autres babioles. Toujours intéressant de discuter avec eux. Je me suis encore fait offrir une chica. On ne sait jamais si en montant en sueur, j’avais subitement un besoin pressant!
La descente vers Baracoa est progressive et n’offre même pas l’adrénaline des routes de montagne. L’asphalte y est de bonne qualité, mais il n’y a pas de pente assez marquée pour s’amuser.
Enfin arrive la ville. Ville décrite dans tous les livres pour touristes comme une ville touristique cachée et oubliée par la plupart des étrangers. C’est faux. Cette ville regorge d’étrangers et les cubains qui y vivent profitent de la manne.
Le Malecon mériterait de recevoir un peu d’amour par contre…
PS : Si vous voulez manger à Baracoa en monnaie nationale il faut sortir de la ville vers le sud. 200m après le pont, sur la droite, il y a un petit restaurant qui ne paye pas de mine.
Jour 7 – Santiago – Guantanamo – San Antonio del Sur
Décidément le voyage solitaire offre des opportunités surprenantes. L’autre jour, entre Puerto Padre et Las Tunas un camionneur c’était mis en arrière de moi en klaxonnant pour finalement me proposer de monter avec lui à cause de la chaleur. Aujourd’hui entre Santiago et Guantanamo, sur l’autoroute, un gars en moto s’approche et me dis de lui prendre l’épaule pour me tirer. Le vent de face aidant j’ai accepté cette petite aide et fait une dizaine de kilomètres sans efforts. Finalement on s’arrête et on jase. Il habite 60 kms après Guantanamo et me propose de m’énerver ce soir. Comment refuser? Ça va en plus me permettre d’arriver un jour plus à Baracoa.
—
Me voilà à San Antonio del sur. Mon nouvel ami n’est pas encore arrivé chez lui et je me suis auto-présenté aux trois femmes qui habitent la maison avec la grand mère et 3 enfants en bas âge. C’est très étrange d’être là au milieu.
Je me suis assuré que ça n’était pas un problème que je dorme chez eux et elles m’ont assuré que non. Après avoir attendu une heure en vêtements j’ai demandé où je pouvais me changer. Sa femme m’a emmené à une chambre en traversant le poulailler. Je crois que c’est la chambre des maîtres et je crois qu’ils vont me la laisser. Pas de fenêtres fermable bien sûr et l’odeur de fiante assez intense.
Ils m’ont demandé si je voulais me laver et je me suis retrouvé dans un bac en béton avec un seau plein d’eau froide et un pot en plastique pour m’arroser. On n’imagine pas à quel point on est malhabile à se laver avec seulement quelques litres difficiles à répartir. Je me suis débrouillé quand même.
J’ai sorti mon ordinateur et collé les enfants devant. On attends l’homme de la famille qui arrivera vers 19h30.
Je comprendrais plus tard qu’il y avait deux hommes de la famille. Celui qui m’a invité et son cousin, moins ravi de ma présence qui pourrait leur causer des ennuis. Habitent aussi là leurs épouses respectives et la grand mère. Chaque famille à sa chambre et c’est la grande mère qui me cède finalement la sienne. Ils me mettent aussi une moustiquaire au dessus du lit pour avoir du confort. Tout est au mieux de ce qu’ils peuvent offrir.
Pour le repas ils y avait 2 pilons pour 4 personnes et les spaghettis qu’ils ont obtenu avec leur carnet de ration mensuel. On a mangé, regardé les nouvelles à la télé gouvernementale et on s’est couché. Ce matin pour déjeuner au lever du jour : un café.
Ces gens ont fait ce qu’ils ont pu avec rien ou presque. C’est ça l’humanité des cubains.
Jour 6 – Santiago de Cuba – Repos
Je suis toujours fasciné par la façon dont les cubains envisagent le sexe. Il semble qu’ici ça fasse partie intégrante du quotidien. Tout le monde en parle sans tabous, même le vieux de 67 ans chez qui je loge à Santiago où j’ai décidé de passer deux nuits. Ici le sexe c’est la vie, et pour beaucoup de cubains et de cubaines c’est aussi une opportunité pour obtenir quelques dollars et parfois trouver quelqu’un qui va les soutenir financièrement et/ou les épouser pour finalement avoir le passeport qui leur permettrait de quitter le pays.
Ne m’étant fait ouvertement draguer par un cubain qu’une seule fois, un épisode mémorable, il y a deux ans à Sancti Spiritus, je ne peux que parler des cubaines. Elles t’abordent sans complexe, te parlent d’amour et te proposent bien assez vite de passer un moment avec elles, parce qu' »une fois que tu as goûté à l’amour d’une cubaine tu ne veux plus jamais autre chose ». Il y a les professionnelles qui ne font que ça et qui sont sans intérêt, mais il y a aussi celles qui vont tenter plus timidement d’avoir mieux qu’un petit coup et quelques dollars. Même quand on leur dit qu’on est pas intéressé par du « sexo » elles font preuve d’une confiance inébranlable et sont certaines qu’elles arriveront quand même à te convaincre et obtenir ce qu’elles veulent. Pour la première fois hier, j’ai rencontré une cubaine qui a accepté l’idée qu’il fallait être mon amie seulement. Elle m’a servi de guide aujourd’hui et nous sommes allés nous promener en bateau dans la baie de Santiago.
Nous avons d’abord pris un camion de transport en commun qui nous a amené à un espèce de traversier. De là nous sommes allés sur une île en avons fait le tour et nous sommes revenus à Santiago. On a parlé de tout et de rien. Elle est vendeuse de vêtements, gagne assez pour avoir une vie confortable je crois, même s’il est toujours difficile de démêler les perceptions dans ce pays mystérieux. C’était agréable et sans pression.
En fin d’après midi, en rentrant, elle s’est arrêté pour faire quelques courses. En guise de remerciement, je lui ai payé son poulet.
Une fois à la casa, après avoir ouvert la serrure du bas, deux barrières cadenassées et la serrure de l’appartement pour entrer, j’ai changé mes pneus pour faire la route jusqu’à Baracoa. Demain je m’arrête à Guantanamo.
Jour 5 – La Mula – Santiago de Cuba
S’arrêter au Campismo à la Mula, c’est être prêt à ne rien faire pendant le temps qu’il reste. La plage est tout à fait ordinaire avec de gros galets. Aucune animation. Un restaurant pour touristes, seulement moi, et un restaurant pour cubains qui n’étaient que les deux afro-cubaines d’une soixantaine d’années qui ne faisaient qu’implorer dieu avec qui j’ai parlé un moment.
Un repas le soir plus que sommaire est dénué de saveur, mais délicieux par rapport à ce qui m’a servi de déjeûner. Une galette qui avait peut-être été un oeuf, 5 bouts de pains ridicules et 5 crottes de fromage. Pas de quoi se lécher les babines.
Au réveil, le vent soufflait dans les arbres me faisant craindre une journée plutôt difficile. Le ciel était gris et le soleil se laissait tout de même deviner sur la mer
. Il devait se lever un peu plus tard avant d’être remplacé par des ondées qui n’ont pas dûré très longtemps. Mais vélo et pluie à Cuba on vite fait de transformer le cycliste sans garde-boue en bouse ambulante.
La route est à La Mula encore une piste pendant une dizaine de kilomètres. Ensuite, sur une courte distance, la terre était enduite de goudron liquide, qui collait au pneus et giclait partout, avant d’être finalement remplacé par un bitume lisse, jusqu’à Santiago.
Le paysage est moins intéressant que dans la première partie de la côte sud, même si le littoral reste spectaculaire. La circulation augmente au fur et à mesure qu’on approche de la métropole, et la montagne se fait plus discrète.
Dix kilomètres avant d’arriver, le trafic se fait plus intense. Les odeurs de gasoil rendent la progression un peu moins agréable, puis s’ajoutent les raffineries. Mais bon arriver dans une grande ville après 120 kilomètres a toujours quelque chose d’enlevant.
Et Santiago a quelque chose que les autres villes n’ont pas, mais il faut y venir pour le sentir.
Jour 4 – Pilon – Las Cuevas – Campismo La Mula
Quand le temps suspend son cours.
Faire la route à l’est de Pilon, au sud de la Sierra Maestra est une des expérience les plus inusitées que j’aurais eu l’occasion de vivre. Parti tôt avec comme objectif d’arriver à Chivirico, la ville à mi-chemin jusqu’à Santiago, notamment pour avoir accès à la toile, je suis parti face au soleil levant, les enfants rejoignant leurs écoles. Bien rapidement, je suis sorti de la petite ville. La surface de la route est devenue inégale et la circulation a réduit. Après quelques coups de pédale, me voilà à Punta Piedra d’où j’ai posté la vidéo incroyable des gamins. Aussitôt transféré, je suis reparti malgré un bug sur un de mes serveurs qui me balance des courriels toutes les minutes.
La route descend lentement, la mer se dessine sur la droite. On passe l’entrée vers le dernier hôtel de Marea del Portillo, et continue encore quelques kilomètres. Puis cet embranchement où la logique te dit d’aller à gauche, mais où il faut partir à droite. Dès lors, on roule avec les mangroves à droite dans une section ombragée et douce. La qualité de l’accotement est meilleure que celle de la chaussée. Bonne idée d’avoir changé de pneus. À partir de ce moment là, seuls 5 véhicules croiseront ma route jusqu’à ce que j’arrête.
La mer et la montagne déploient leur beauté incroyable. La route, qui probablement fut un jour très belle a clairement perdu le combat contre la force de la nature. Les montées et le descentes se succèdent quand la falaise a été trop abrupte pour se laisser dompter et la qualité du bitume est variable. Sans doute qu’on pourrait passer avec un pneu de 23, mais ce serait inconfortable. Je suis saisi par le paysage, et plus j’avance, plus je ralentis et plus je rentre dans un mode contemplatif. La nature. Sauvage. Belle. Magique. Impossible de passer dans ses paysages la tête dans le guidon.
Au détour d’un village, je m’arrête pour demander de l’eau. On m’offre du café. Un vendeur de tomates m’interpelle. Au milieu de nulle part, la vie est suspendue au temps qui n’est pas pressé. Je me rends à l’évidence. Il faut que je prenne le temps. Je m’arrête donc en chemin au campismo La Mula. J’ai un petit bungalow sous les arbres, un ventilateur qui devrait marcher ce soir quand l’électricité sera allumée et deux lits. Un confort rustique mais suffisant.
Loin du cellulaire et de l’internet. Loin du tumulte de la vie moderne, mais tellement bien.
Jour 3 – Manzanillo – Pilon
Me voici donc a Pilon. Je savais que de faire le tour dans le sens anti horaire pourrait etre un defi supplementaire. J’ai eu un vent de face et beaucoup de soleil sur une bonne partie du trajet. La route etait par ailleurs de qualite bien mediocre.
Demain risque d’etre une journee difficile. Coince entre la Sierra Maestra et la mer, seul sur une route ou ne passent que quelques voitures par jour. La qualite de la route est incertaine, alors je vais changer de pneus.
Pas certain que j’aurais de l’internet demain. Ca va dependre de la distance que j’arrive a faire!
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Pilon m’a réservé de bons moments et la difficulté du chemin pour y venir en valait la peine. La première se cache à la fin de la vidéo que j’espère pouvoir télécharger en passant à côté de l’hôtel à Marea del Portillo.
La deuxième a été la rencontre d’un gars avec qui j’ai d’abord joué aux dames dans le parc. Ensuite il a voulu m’amener dans sa famille et nous avons fait une partie de dominos endiablée avec deux gamins. Ils m’ont fait visiter leur maison. Pas d’eau. Pas de salle de bain. Et dans un coin un autel de brujería, une croyance locale proche du vaudou.
Plus tard, une jeune maman avec son bébé, bien déçue que je sois marié, m’a fait promettre de lui chercher un téléphone usagé à mon retour et de le lui envoyer par un touriste qui viendrait à l’hôtel.. Si quelqu’un parmi mes lecteurs a un vieil appareil qui moisis dans un tiroir à donner, je suis preneur.
Couché tôt. Lever à 6h.
Jour 2 – Las Tunas – Manzanillo
Je sors de Las Tunas avant que le soleil ne commence à plomber. À 7h30, je suis déjà sur mon vélo. Petit passage de vérification au Wifi, conscience professionnelle oblige, et me voilà roulant directions Sud Ouest. Le soleil est si bas et l’asphalte tellement astiqué par les sabots des chevaux que la chaussée fait un miroir. C’est l’heure à laquelle les parents emmènent leurs enfants à l’école. Et bien sûr, le moyen de prédilection pour déposer sa progéniture est le vélo. Les gamins sont tous vêtus de rouge et blanc, tantôt assis sur le porte bagage, tantôt sur la barre du cadre, parfois un rejeton à l’avant et un autre à l’arrière. Une scène amusante que dans mon empressement de ne pas brûler au soleil je n’ai pas croquée. Dommage.
La route en tant que telle n’avait pas grand chose de palpitant. De longues lignes droite, une qualité similaire aux rangs du Québec, peu de circulation. À droite des champs de canne à sucre. À gauche, des champs de canne à sucre. Le soleil se levant c’était quand même très agréable, et les arbres sur le côté faisaient une ombre déjà appréciée malgré l’heure matinale. À un moment, un tracteur transportant des passagers dans sa remorque s’est mis devant moi me coupant le léger vent. Je l’ai suivi pendant longtemps, ce qui m’a permis d’augmenter ma moyenne et réduire mon effort.
Après environ 60 kilomètres j’ai pris à gauche en direction de Manzanillo. Une petite route cahoteuse avec des panneaux pour signaler les nids d’autruche. Toujours des cannes à sucre, mais comme elle longeait le canal d’irrigation, il y avait une partie ombragée. J’ai roulé, tranquillement sous le soleil de plomb. À un moment, j’ai doublé un papi en vélo. Son vélo grinçait comme une vieille girouette. Je lui ai offert de l’huile, mais c’était simplement inutile. Sa chaîne complètement distendue craquait et rongeait son pédalier. Il avait un besoin urgent d’une nouvelle chaine, mais il n’en avait clairement pas les moyens. Je l’ai attendu et j’ai fait un bout de route avec lui. Il était allé chercher du riz. Il a vite fait de me dire que le vélo c’était sa vie. Qu’il en avait besoin pour se déplacer, et m’a même demandé quel était mon braquet, calculant la vitesse maximum qu’il pensait que je pourrais atteindre.
Nous avons fait un bout ensemble, puis il s’est arrêté chez une de ses cousines, m’a présenté. Sitôt entré dans leur maison, ils m’ont offert un grand verre d’eau froide que je me suis risqué à boire, et bien sûr le légendaire café dont ils m’ont révélé un secret. On a jasé de ci, de cà, du Venezuela, de l’immigration etc. On est ensuite reparti, et Miguel voulait m’emmener à la maison d’un amigo pour passer la nuit. Une casa illégale, que le gars m’aurait bien loué probablement pour pas grand chose, mais il y avait une culture de champignons et l’humidité ambiante m’ont fait rebrousser chemin. J’ai donc trouvé une casa, pour 20$ avec le déjeuner. Plutôt jolie dans Manzanillo que je vais aller visiter.
Miguel, qui m’a amené à la casa n’a même pas osé demander sa commission. Alors, je lui ai donné 100 pesos et je lui ai dit d’aller s’acheter une chaîne, avant que son vélo ne soit foutu. Il m’a donné une accolade et m’a dit « Te quiero ». Je lui ai promis de lui envoyer une photo, à mon retour.
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Pas grand chose à dire sur Manzanillo. Je l’ai sillonnée de long en large sur mon vélo pendant l’après midi. Un malecon comme toutes les villes cubaines en bord de mer, une gare de train déserte probablement parce que c’est le terminus, une zone piétone centrale avec quelques commerces peu invitants, et des rues vides avec des maisons sans étage, sans doute pour résister aux vents quand ils s’enragent. Une ville de pêcheurs tout à fait ordinaire et sans touristes, qui sont tous à quelques kilomètres dans les hôtels.
La seule anecdote amusante de la journée a été avec trois gamins. La ville est sur plusieurs butes et je montais l’une d’elle quand je les ai croisés. Ils jouaient à tirer les oiseaux avec des lance-pierre. L’un d’entre eux me lance « where are you from » avec l’inimitables accent cubain. Habituellement, je ne réponds plus, mais là ils étaient rigolos. Alors je m’arrête et leur dit en espagnol que je viens du Canada et que je parle leur lange. Le petit gars me dit du tac au tac « Lleva me contigo », ce qui fait bien rire tout le monde. Alors je lui explique qu’il fait froid chez nous, et sans manquer de répartie il renchérit en disant qu’il s’habillera. Puis dans la foulée, il appelle sa mère qui sort de la maison d’à côté et lui dit « Mama ven a conocer a mi nuevo tio! ». Franche rigolade.
Ensuite, je suis rentré à la casa, j’ai pris la carriole qui sert de transport en commun et je suis allé manger dans le restau recommandé par Trip Advisor. Succulent, mais plus cher qu’annoncé. Mais bon, je me suis mis des crevettes en sauce plein la panse, et même si ça ne contient pas beaucoup d’énergie ça devrait me permettre d’avaler les quelques kilomètres de demain.