Jour 14 – Retour à la réalité

cuba2016

C’est toujours un choc quand on rentre à l’aéroport après avoir passé deux semaines hors des sentiers battus. Ça me remue tellement que je n’en ai pas fait de photos. Au bout d’une allée bordée de palmiers se trouve le bâtiment. En face, des autobus de touristes facilement reconnaissables car ce sont les seuls autobus de luxe de l’île ont déjà déversé leur flot de gens rassasiés et grillés après une semaine aux petits soins dans ce paradis terrestre. Comme on est à Cuba, il n‘y a que deux comptoirs pour s’enregistrer et la queue est interminable.

C’est là que le français en moi, affublé du sobriquet de chialeux dont j’ai hérité par magie de mes compatriotes se bidonne bien. Les touristes se retrouvent soudain face à la réalité, même édulcorée, de la bureaucratie cubaine et deviennent les champions du monde de la critique et de l’arrogance. Difficile, après une semaine où tout le monde est à tes pieds, de trouver des toilettes puantes pour lesquelles il faut payer et qui n’ont pas de porte qui barre. Difficile de ne pas pouvoir faire ses courses au hors taxes parce que la carte de crédit n’est pas fonctionnelle aujourd’hui. Mañana la tarjeta. Difficile de devoir payer pour un hot dog sans saveur. Bref, un moment de divertissement doux amer qui force la réflexion sur la planète dans laquelle nous vivons.

Ce voyage de deux semaines dans la vie cubaine a été d’une intensité sans pareil. J’ai pu plonger dans une réalité dont une grande partie m’échappe encore. Je suis en admiration devant la façon dont les cubains luttent chaque jour pour remplir leur assiette, et celle des autres si quelqu’un vient à passer. Ces moments que j’ai partagé avec vous, et d’autres que je n’ai pas pu dévoiler ou que je n’ai pas pris le temps de raconter auront sans doute un impact important sur ma vie. Difficile dans leur peau de faire confiance à l’avenir. L’incertitude quant à la succession du régime, l’impossibilité d’envisager l’avenir de façon optimiste quand ils voient la lenteur des changements, la difficulté constante à obtenir des produits de première nécessité, l’imprévisibilité des forces de l’ordre.

Un endroit plein de mystères où nous avons la chance de ne pas être né.

Je voulais aussi remercier tous ceux qui m’ont suivi dans cette aventure et qui ont commenté mes publications. Je suis chanceux de vous avoir comme amis. Finalement, ceci ne serait pas possible sans la confiance et l’amour de ma chérie que je suis bien content de retrouver!

Je posterai peut-être d’autres anecdotes d’ici les prochains jours, mais le mieux serait de se voir pour en jaser. Rien ne vaut un bon vieux contact humain! (tous les chialeux français sont aussi invités à la maison).

Adios amigos!

Jour 12-13 – Holguin – Gibara – Playa la Herradura – Velazco – Holguin


La Playa la Herradura est un endroit à Cuba où il est étonnant qu’il n’y ait pas encore d’hôtel. C’est une plage prisée par les cubains, une petite baie sablonneuse avec la mer qui entre et sort dans le village au gré des marées. Un endroit d’une grande quiétude, à l’abri de la foule. Nous y étions allé l’an dernier et j’ai voulu y repasser.

Cependant afin de mettre un peu de piquant dans l’aventure, je suis passé par Gibara, puis j’ai longé la côte jusqu’à Playa Caletones. La route y est en corail concassé et tout se passe bien. J’ai croisé un pêcheur de requins qui tue ses proies au couteau, puis à Caletones un belge flamand installé là depuis quelques années.

C’est quand on repart vers le sud que ça se gâte. Le chemin devient de plus en plus boueux et finit par être quasiment impraticable pendant plusieurs kilomètres. Il débouche ensuite sur un village où visiblement les étrangers y sont étranges car jamais présents. Enfin, après quelques kilomètres on rejoint la route qui mène à La Herradura. Expérience difficile de boue et de solitude.

Passé un après midi relaxe à la Herradura, regardé un film sur mon téléphone, mangé comme un roi, et le lendemain retour tranquille jusqu’à Holguin pour préparer mon vélo.

Jour 10 – Moa – Holguin – 190kms dont 130 sous la pluie

Ce matin en me levant dans ma ville dortoir, il pleuvait des cordes. Inimaginable de rester là une journée de plus. Je suis donc parti sous la pluie avec en tête d’aller jusqu’à Holguin, près de 190kms plus loin. J’ai fait 130kms avant qu’elle arrête de tomber. Un long moment grisant léché par la douceur de la température et le bruit des pneus sur l’asphalte. Il faut cependant bien fermer la bouche particulièrement dans les descentes pour ne pas avaler de coliformes.

Cuba est tout de même un pays étrange. En route aujourd’hui je me suis arrêté à Cueto. J’aurais pris un refresco ou même une cerveza mais le frigo pour les boissons en cannettes était en panne donc rien de frais sauf de l’eau ou du jus car l’autre réfrigérateur, à moitié vide, lui fonctionnait. Dans n’importe quel pays ailleurs la serveuse se serait fait virer mais ici c’est simplement normal. Un des côtés désagréable du communisme ou l’efficacité n’est pas un critère.

 

Jour 9 – Baracoa – Moa / Mud Fest!

Aujourd´hui je me suis arrete a Moa. C´est mon velo qui m´a dit stop. Suis parti sous la pluie et les averses ont dure un bon moment. Apres 6 kilometres et pour les 40 kms suivants, le chemin devient une pìste de terre et de boue. J´ai des photos, mais impossible de les charger ici. Je me suis bien amuse, mais la mecanique a souffert. Il a vraiment fallu que je m´arrete pour entretenir le velo. J´ai aussi une sacoche qui montre des signes de faiblesse.

Moa est une ville miniere, on y produit du nickel. Le principal employeur de la ville est une co entreprise du gouvernement cubain et d´une compagnie canadienne dont je ne connais pas le nom. Quand je vois l´etat general de la ville, les conditions de vie des gens qui y vivent, j´ai pas mal honte d´etre canadien. Cette entreprise dont je trouverai le nom est indigne. Il n´y a pas de centre ville. Seulement des centaines d´immeubles delabres.

Demain je continue vers l´ouest, et je ne sais pas encore ou je vais m´arreter. Si j´ai une meilleure connexion, je vous mettrai des photos. La je suis dans un hotel sur un pc en 1024×768 avec Windows XP et un Kapersky version d´essai expire!

Jour 8 – San Antonio del Sur – Cajo Babo – Baracoa

De San Antonio del Sur à Baracoa, il faut monter la fameuse Farola. Une route de montagne qui serpente dans la forêt tropicale. Mais avant la Farola, il y a Cajo Babo. Un petit village où nous avions passé une nuit au Campismo l’an dernier et où nous avions fait connaissance de la famille de Jose l’an dernier. Le jeune avait emmené les enfants dans la campagne pour chercher du miel en enfumant les abeilles. Ils avaient aussi fait des concours pour monter aux cocotiers. De très bons souvenirs, alors il était impossible de passer à Cajo Babo sans s’y arrêter.

Tout de suite, ils m’ont servi un déjeûner et accueilli comme un membre de la famille. Daniel, le fils travaille maintenant comme boulanger stagiaire. Il gagne un gros 90 pesos cubains par mois (environ 4$) et aura un salaire de 300 pesos à la fin de son stage. Il prépare 2000 pains tous les jours. C’est un gamin vraiment vivant et intéressant qui mériterait mieux.

Après m’être restauré, j’ai quitté la famille pour faire l’ascension. C’était plus facile que prévu. Je me suis arrêté à de nombreux endroits, et particulièrement dans les virages de la montée où se trouvent des vendeurs de chocolat, pâte de coco, et autres babioles. Toujours intéressant de discuter avec eux. Je me suis encore fait offrir une chica. On ne sait jamais si en montant en sueur, j’avais subitement un besoin pressant!

La descente vers Baracoa est progressive et n’offre même pas l’adrénaline des routes de montagne. L’asphalte y est de bonne qualité, mais il n’y a pas de pente assez marquée pour s’amuser.

Enfin arrive la ville. Ville décrite dans tous les livres pour touristes comme une ville touristique cachée et oubliée par la plupart des étrangers. C’est faux. Cette ville regorge d’étrangers et les cubains qui y vivent profitent de la manne.

Le Malecon mériterait de recevoir un peu d’amour par contre…

PS : Si vous voulez manger à Baracoa en monnaie nationale il faut sortir de la ville vers le sud. 200m après le pont, sur la droite, il y a un petit restaurant qui ne paye pas de mine.

Jour 7 – Santiago – Guantanamo – San Antonio del Sur

Décidément le voyage solitaire offre des opportunités surprenantes. L’autre jour, entre Puerto Padre et Las Tunas un camionneur c’était mis en arrière de moi en klaxonnant pour finalement me proposer de monter avec lui à cause de la chaleur. Aujourd’hui entre Santiago et Guantanamo, sur l’autoroute, un gars en moto s’approche et me dis de lui prendre l’épaule pour me tirer. Le vent de face aidant j’ai accepté cette petite aide et fait une dizaine de kilomètres sans efforts. Finalement on s’arrête et on jase. Il habite 60 kms après Guantanamo et me propose de m’énerver ce soir. Comment refuser? Ça va en plus me permettre d’arriver un jour plus à Baracoa.

Me voilà à San Antonio del sur. Mon nouvel ami n’est pas encore arrivé chez lui et je me suis auto-présenté aux trois femmes qui habitent la maison avec la grand mère et 3 enfants en bas âge. C’est très étrange d’être là au milieu.
Je me suis assuré que ça n’était pas un problème que je dorme chez eux et elles m’ont assuré que non. Après avoir attendu une heure en vêtements j’ai demandé où je pouvais me changer. Sa femme m’a emmené à une chambre en traversant le poulailler. Je crois que c’est la chambre des maîtres et je crois qu’ils vont me la laisser. Pas de fenêtres fermable bien sûr et l’odeur de fiante assez intense.
Ils m’ont demandé si je voulais me laver et je me suis retrouvé dans un bac en béton avec un seau plein d’eau froide et un pot en plastique pour m’arroser. On n’imagine pas à quel point on est malhabile à se laver avec seulement quelques litres difficiles à répartir. Je me suis débrouillé quand même.
J’ai sorti mon ordinateur et collé les enfants devant. On attends l’homme de la famille qui arrivera vers 19h30.
Je comprendrais plus tard qu’il y avait deux hommes de la famille. Celui qui m’a invité et son cousin, moins ravi de ma présence qui pourrait leur causer des ennuis. Habitent aussi là leurs épouses respectives et la grand mère. Chaque famille à sa chambre et c’est la grande mère qui me cède finalement la sienne. Ils me mettent aussi une moustiquaire au dessus du lit pour avoir du confort. Tout est au mieux de ce qu’ils peuvent offrir.
Pour le repas ils y avait 2 pilons pour 4 personnes et les spaghettis qu’ils ont obtenu avec leur carnet de ration mensuel. On a mangé, regardé les nouvelles à la télé gouvernementale et on s’est couché. Ce matin pour déjeuner au lever du jour : un café.

Ces gens ont fait ce qu’ils ont pu avec rien ou presque. C’est ça l’humanité des cubains.

Jour 6 – Santiago de Cuba – Repos

Je suis toujours fasciné par la façon dont les cubains envisagent le sexe. Il semble qu’ici ça fasse partie intégrante du quotidien. Tout le monde en parle sans tabous, même le vieux de 67 ans chez qui je loge à Santiago où j’ai décidé de passer deux nuits. Ici le sexe c’est la vie, et pour beaucoup de cubains et de cubaines c’est aussi une opportunité pour obtenir quelques dollars et parfois trouver quelqu’un qui va les soutenir financièrement et/ou les épouser pour finalement avoir le passeport qui leur permettrait de quitter le pays.

Ne m’étant fait ouvertement draguer par un cubain qu’une seule fois, un épisode mémorable, il y a deux ans à Sancti Spiritus, je ne peux que parler des cubaines. Elles t’abordent sans complexe, te parlent d’amour et te proposent bien assez vite de passer un moment avec elles, parce qu' »une fois que tu as goûté à l’amour d’une cubaine tu ne veux plus jamais autre chose ». Il y a les professionnelles qui ne font que ça et qui sont sans intérêt, mais il y a aussi celles qui vont tenter plus timidement d’avoir mieux qu’un petit coup et quelques dollars. Même quand on leur dit qu’on est pas intéressé par du « sexo » elles font preuve d’une confiance inébranlable et sont certaines qu’elles arriveront quand même à te convaincre et obtenir ce qu’elles veulent. Pour la première fois hier, j’ai rencontré une cubaine qui a accepté l’idée qu’il fallait être mon amie seulement. Elle m’a servi de guide aujourd’hui et nous sommes allés nous promener en bateau dans la baie de Santiago.

Nous avons d’abord pris un camion de transport en commun qui nous a amené à un espèce de traversier. De là nous sommes allés sur une île en avons fait le tour et nous sommes revenus à Santiago. On a parlé de tout et de rien. Elle est vendeuse de vêtements, gagne assez pour avoir une vie confortable je crois, même s’il est toujours difficile de démêler les perceptions dans ce pays mystérieux. C’était agréable et sans pression.

En fin d’après midi, en rentrant, elle s’est arrêté pour faire quelques courses. En guise de remerciement, je lui ai payé son poulet.

Une fois à la casa, après avoir ouvert la serrure du bas, deux barrières cadenassées et la serrure de l’appartement pour entrer, j’ai changé mes pneus pour faire la route jusqu’à Baracoa. Demain je m’arrête à Guantanamo.

Jour 5 – La Mula – Santiago de Cuba

S’arrêter au Campismo à la Mula, c’est être prêt à ne rien faire pendant le temps qu’il reste. La plage est tout à fait ordinaire avec de gros galets. Aucune animation. Un restaurant pour touristes, seulement moi, et un restaurant pour cubains qui n’étaient que les deux afro-cubaines d’une soixantaine d’années qui ne faisaient qu’implorer dieu avec qui j’ai parlé un moment.
Un repas le soir plus que sommaire est dénué de saveur, mais délicieux par rapport à ce qui m’a servi de déjeûner. Une galette qui avait peut-être été un oeuf, 5 bouts de pains ridicules et 5 crottes de fromage. Pas de quoi se lécher les babines.
Au réveil, le vent soufflait dans les arbres me faisant craindre une journée plutôt difficile. Le ciel était gris et le soleil se laissait tout de même deviner sur la mer
. Il devait se lever un peu plus tard avant d’être remplacé par des ondées qui n’ont pas dûré très longtemps. Mais vélo et pluie à Cuba on vite fait de transformer le cycliste sans garde-boue en bouse ambulante.
La route est à La Mula encore une piste pendant une dizaine de kilomètres. Ensuite, sur une courte distance, la terre était enduite de goudron liquide, qui collait au pneus et giclait partout, avant d’être finalement remplacé par un bitume lisse, jusqu’à Santiago.
Le paysage est moins intéressant que dans la première partie de la côte sud, même si le littoral reste spectaculaire. La circulation augmente au fur et à mesure qu’on approche de la métropole, et la montagne se fait plus discrète.
Dix kilomètres avant d’arriver, le trafic se fait plus intense. Les odeurs de gasoil rendent la progression un peu moins agréable, puis s’ajoutent les raffineries. Mais bon arriver dans une grande ville après 120 kilomètres a toujours quelque chose d’enlevant.
Et Santiago a quelque chose que les autres villes n’ont pas, mais il faut y venir pour le sentir.

Jour 4 – Pilon – Las Cuevas – Campismo La Mula

Quand le temps suspend son cours.

Faire la route à l’est de Pilon, au sud de la Sierra Maestra est une des expérience les plus inusitées que j’aurais eu l’occasion de vivre. Parti tôt avec comme objectif d’arriver à Chivirico, la ville à mi-chemin jusqu’à Santiago, notamment pour avoir accès à la toile, je suis parti face au soleil levant, les enfants rejoignant leurs écoles. Bien rapidement, je suis sorti de la petite ville. La surface de la route est devenue inégale et la circulation a réduit. Après quelques coups de pédale, me voilà à Punta Piedra d’où j’ai posté la vidéo incroyable des gamins. Aussitôt transféré, je suis reparti malgré un bug sur un de mes serveurs qui me balance des courriels toutes les minutes.

La route descend lentement, la mer se dessine sur la droite. On passe l’entrée vers le dernier hôtel de Marea del Portillo, et continue encore quelques kilomètres. Puis cet embranchement où la logique te dit d’aller à gauche, mais où il faut partir à droite. Dès lors, on roule avec les mangroves à droite dans une section ombragée et douce. La qualité de l’accotement est meilleure que celle de la chaussée. Bonne idée d’avoir changé de pneus. À partir de ce moment là, seuls 5 véhicules croiseront ma route jusqu’à ce que j’arrête.

La mer et la montagne déploient leur beauté incroyable. La route, qui probablement fut un jour très belle a clairement perdu le combat contre la force de la nature. Les montées et le descentes se succèdent quand la falaise a été trop abrupte pour se laisser dompter et la qualité du bitume est variable. Sans doute qu’on pourrait passer avec un pneu de 23, mais ce serait inconfortable. Je suis saisi par le paysage, et plus j’avance, plus je ralentis et plus je rentre dans un mode contemplatif. La nature. Sauvage. Belle. Magique. Impossible de passer dans ses paysages la tête dans le guidon.

Au détour d’un village, je m’arrête pour demander de l’eau. On m’offre du café. Un vendeur de tomates m’interpelle. Au milieu de nulle part, la vie est suspendue au temps qui n’est pas pressé. Je me rends à l’évidence. Il faut que je prenne le temps. Je m’arrête donc en chemin au campismo La Mula. J’ai un petit bungalow sous les arbres, un ventilateur qui devrait marcher ce soir quand l’électricité sera allumée et deux lits. Un confort rustique mais suffisant.

Loin du cellulaire et de l’internet. Loin du tumulte de la vie moderne, mais tellement bien.

Jour 3 – Manzanillo – Pilon

Me voici donc a Pilon. Je savais que de faire le tour dans le sens anti horaire pourrait etre un defi supplementaire. J’ai eu un vent de face et beaucoup de soleil sur une bonne partie du trajet. La route etait par ailleurs de qualite bien mediocre.

Demain risque d’etre une journee difficile. Coince entre la Sierra Maestra et la mer, seul sur une route ou ne passent que quelques voitures par jour. La qualite de la route est incertaine, alors je vais changer de pneus.

Pas certain que j’aurais de l’internet demain. Ca va dependre de la distance que j’arrive a faire!

Pilon m’a réservé de bons moments et la difficulté du chemin pour y venir en valait la peine. La première se cache à la fin de la vidéo que j’espère pouvoir télécharger en passant à côté de l’hôtel à Marea del Portillo.
La deuxième a été la rencontre d’un gars avec qui j’ai d’abord joué aux dames dans le parc. Ensuite il a voulu m’amener dans sa famille et nous avons fait une partie de dominos endiablée avec deux gamins. Ils m’ont fait visiter leur maison. Pas d’eau. Pas de salle de bain. Et dans un coin un autel de brujería, une croyance locale proche du vaudou.

Plus tard, une jeune maman avec son bébé, bien déçue que je sois marié, m’a fait promettre de lui chercher un téléphone usagé à mon retour et de le lui envoyer par un touriste qui viendrait à l’hôtel.. Si quelqu’un parmi mes lecteurs a un vieil appareil qui moisis dans un tiroir à donner, je suis preneur.

Couché tôt. Lever à 6h.

Jour 2 – Las Tunas – Manzanillo

Je sors de Las Tunas avant que le soleil ne commence à plomber. À 7h30, je suis déjà sur mon vélo. Petit passage de vérification au Wifi, conscience professionnelle oblige, et me voilà roulant directions Sud Ouest. Le soleil est si bas et l’asphalte tellement astiqué par les sabots des chevaux que la chaussée fait un miroir. C’est l’heure à laquelle les parents emmènent leurs enfants à l’école. Et bien sûr, le moyen de prédilection pour déposer sa progéniture est le vélo. Les gamins sont tous vêtus de rouge et blanc, tantôt assis sur le porte bagage, tantôt sur la barre du cadre, parfois un rejeton à l’avant et un autre à l’arrière. Une scène amusante que dans mon empressement de ne pas brûler au soleil je n’ai pas croquée. Dommage.

La route en tant que telle n’avait pas grand chose de palpitant. De longues lignes droite, une qualité similaire aux rangs du Québec, peu de circulation. À droite des champs de canne à sucre. À gauche, des champs de canne à sucre. Le soleil se levant c’était quand même très agréable, et les arbres sur le côté faisaient une ombre déjà appréciée malgré l’heure matinale. À un moment, un tracteur transportant des passagers dans sa remorque s’est mis devant moi me coupant le léger vent. Je l’ai suivi pendant longtemps, ce qui m’a permis d’augmenter ma moyenne et réduire mon effort.

Après environ 60 kilomètres j’ai pris à gauche en direction de Manzanillo. Une petite route cahoteuse avec des panneaux pour signaler les nids d’autruche. Toujours des cannes à sucre, mais comme elle longeait le canal d’irrigation, il y avait une partie ombragée. J’ai roulé, tranquillement sous le soleil de plomb. À un moment, j’ai doublé un papi en vélo. Son vélo grinçait comme une vieille girouette. Je lui ai offert de l’huile, mais c’était simplement inutile. Sa chaîne complètement distendue craquait et rongeait son pédalier. Il avait un besoin urgent d’une nouvelle chaine, mais il n’en avait clairement pas les moyens. Je l’ai attendu et j’ai fait un bout de route avec lui. Il était allé chercher du riz. Il a vite fait de me dire que le vélo c’était sa vie. Qu’il en avait besoin pour se déplacer, et m’a même demandé quel était mon braquet, calculant la vitesse maximum qu’il pensait que je pourrais atteindre.

Nous avons fait un bout ensemble, puis il s’est arrêté chez une de ses cousines, m’a présenté. Sitôt entré dans leur maison, ils m’ont offert un grand verre d’eau froide que je me suis risqué à boire, et bien sûr le légendaire café dont ils m’ont révélé un secret. On a jasé de ci, de cà, du Venezuela, de l’immigration etc. On est ensuite reparti, et Miguel voulait m’emmener à la maison d’un amigo pour passer la nuit. Une casa illégale, que le gars m’aurait bien loué probablement pour pas grand chose, mais il y avait une culture de champignons et l’humidité ambiante m’ont fait rebrousser chemin. J’ai donc trouvé une casa, pour 20$ avec le déjeuner. Plutôt jolie dans Manzanillo que je vais aller visiter.

Miguel, qui m’a amené à la casa n’a même pas osé demander sa commission. Alors, je lui ai donné 100 pesos et je lui ai dit d’aller s’acheter une chaîne, avant que son vélo ne soit foutu. Il m’a donné une accolade et m’a dit « Te quiero ». Je lui ai promis de lui envoyer une photo, à mon retour.

Pas grand chose à dire sur Manzanillo. Je l’ai sillonnée de long en large sur mon vélo pendant l’après midi. Un malecon comme toutes les villes cubaines en bord de mer, une gare de train déserte probablement parce que c’est le terminus, une zone piétone centrale avec quelques commerces peu invitants, et des rues vides avec des maisons sans étage, sans doute pour résister aux vents quand ils s’enragent. Une ville de pêcheurs tout à fait ordinaire et sans touristes, qui sont tous à quelques kilomètres dans les hôtels.

La seule anecdote amusante de la journée a été avec trois gamins. La ville est sur plusieurs butes et je montais l’une d’elle quand je les ai croisés. Ils jouaient à tirer les oiseaux avec des lance-pierre. L’un d’entre eux me lance « where are you from » avec l’inimitables accent cubain. Habituellement, je ne réponds plus, mais là ils étaient rigolos. Alors je m’arrête et leur dit en espagnol que je viens du Canada et que je parle leur lange. Le petit gars me dit du tac au tac « Lleva me contigo », ce qui fait bien rire tout le monde. Alors je lui explique qu’il fait froid chez nous, et sans manquer de répartie il renchérit en disant qu’il s’habillera. Puis dans la foulée, il appelle sa mère qui sort de la maison d’à côté et lui dit « Mama ven a conocer a mi nuevo tio! ». Franche rigolade.

Ensuite, je suis rentré à la casa, j’ai pris la carriole qui sert de transport en commun et je suis allé manger dans le restau recommandé par Trip Advisor. Succulent, mais plus cher qu’annoncé. Mais bon, je me suis mis des crevettes en sauce plein la panse, et même si ça ne contient pas beaucoup d’énergie ça devrait me permettre d’avaler les quelques kilomètres de demain.

Las Tunas - Manzanillo

Cycling Las Tunas - Manzanillo en vélo.
Malecon de Manzanillo de Cuba

Jour 1 – Holguin – Las Tunas

Lundi matin. Lever 6h30. Déjeûner à la cubaine avec fruits, oeufs etc. Serré mes sacoches et j’ai levé le camp assez vite. Comme c’est la première fois que je roule avec des sacoches, je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Et bien je suis agréablement surpris. En dehors des montées, et quand la route est de mauvaise qualité, on ne perçois pas tant que ça le poids supplémentaire. Par contre la prudence est de mise quand ça descends.

La première partie de la journée est allé rondement. L’endorphine dans le tapis et le plaisir grisant d’avaler les kilomètres alors que la température était encore fraîche. En peu de temps, je me suis retrouvé à Puerto Padre. Souvenirs du voyage familial de l’an dernier, et particulièrement de cette photo de Maïté avec Don Quichote. J’en ai pris une autre pour la peine… Il commençait à faire chaud, alors j’ai avalé un helado et continué mon chemin. Il restait encore environ 60 kms. De ces kilomètres qui n’en finissent pas. Un faut plat permanent, des lignes droites interminables, et une chaleur écrasante. Ma stratégie de remplir de l’eau au robinet et de la chlorer fonctionne bien d’ailleurs. Je ne suis jamais déshydraté. Arrivé à Vasquez j’ai dîné avec une Pizza dans l’ambiance bruyante de la gare. Finalement, juste avant l’arrivée à Las Tunas, j’ai rechargé les batteries à la Mayabe!

Arrivé vers 14h à Las Tunas, je suis retourné à la casa de l’an dernier. Douche. Sieste et je vais voir si je suis en mesure d’envoyer tout ça…

Passé la fin de l’après midi dans le coin du parc avec Foglia. D’un oeil distrait, je regardais les gros porcs allemands qui viennent chercher de la chair fraîche sur la terrasse du Cadillac. Chaque année c’est pareil, il y a toujours des gens qui pourraient être mon père qui sont là à profiter de la misère. C’est dégoûtant. Étonnament, comme j’étais tout seul, je n’ai jamais été dérangé ou approché ce qui contredit la version de Guy qui prétend toujours que les cubaines nous collent parce que je suis là. Et bien non. J’ai été plutôt tranquille. Le soleil tournant, j’ai perdu ma place à l’ombre et je suis allé me réfugier sur un banc dans le parc.

C’est une scène un peu étonnante qui s’y déroule. En effet depuis presque un an, le gouvernement cubain installe des points d’accès Wifi pour que les gens puissent surfer sur internet. Ça coûte 2CUC de l’heure ce qui est cher, mais semble abordable pour pas mal de monde. Il y a donc des familles qui viennent faire de la vidéoconférence, des jeunes qui vont sur facebook et autres etc. C’est un drôle de mélange et je ferai une photo au prochain. Au bout d’un moment, j’ai fini par me faire aborder par une jeune fille. J’ai discuté un peu avec elle, mais quand elle a compris que j’étais plus intéressé par la situation politique et du développement de l’île que par ses fesses elle a pris ses cliques et ses claques.

Je suis retourné au Cadillac après avoir mangé chez Lola. Rien d’extraordinaire ce paladar que m’avait recommandé le gars de la casa. Pas cher, mais vraiment ordinaire. Il y avait moins de monde que l’après midi. J’ai pris un verre de rhum et j’ai observé le manège des gens autour. Finalement à la table à côté de moi, deux gars se sont assis, dont un qui avait l’air plutôt sportif. Je lui ai demandé s’il était cycliste et j’ai eu deux « amis » pour la soirée. Il était coiffeur, et il prétendait travailler pour les touristes et faire parfois jusqu’à 500CUC par jour. On a discuté de choses et d’autres et plus particulièrement de la prostitution à Cuba. C’était très intéressant.

Maintenant dodo. Demain une centaine de kilomètre pour me rendre à Manzanillo. Le dernier endroit où je sois à peu près certain d’avoir de l’internet avant de disparaître quelques jours derrière la Sierra Maestra.

En route vers Cuba

10 janvier 2016

C’est avec un mélange d’anxiété, de joie et de tristesse que je laisse partir Ariane de l’aéroport. Mon vélo dans sa boite, mes deux sacoches prêtes pour le périple, je franchis les portes de l’aéroport avec un sentiment jusqu’alors inconnu. Il aura fallu attendre presque 45 ans pour que je parte pour la première fois en vacances seul, sans plan définitif et avec des morceaux d’itinéraires aléatoires, tant au niveau de la qualité de la route qu’au niveau des possibilités de s’alimenter et de dormir.
Je crois que tout va bien se passer, mais c’est toujours un peu effrayant de se retrouver seul dans des zones reculées. Mais bon Cuba devrait remplir son lot de promesses et c’est un départ.

La file à l’aéroport est interminable et ce moment à passer au milieu des gens qui se ruent vers les tout inclus est toujours un moment que je trouve particulièrement décalé. Je vais au même endroit qu’eux, mais l’expérience que nous allons vivre est aux antipodes. Il y a les couples avec leurs enfants, les jeunes tonitruants qui se sont mis de chapeaux et des colliers tahitiens, les raleurs qui s’impatientent pour aller prendre le même vol que tout le monde, ceux qui se sentent les rois de la terre parce qu’ils peuvent s’offrir une parcelle de vacances avec quelqu’un d’exploité à leur service. Et moi. Seul avec mes doutes et mes joies.

Finalement, on monte dans l’avion. À ce moment là c’est à mon fils que je pense. Il est devant son ordinateur, sur son simulateur, en train d’écouter les échanges de la tour de contrôle pour faire le trajet avec moi, mais aux commandes. Ça m’amuse et en même temps je suis bien content qu’il se soit trouvé une passion. L’avion décolle. Un vol un peu turbulent au début, mais fiston a bien fait ça et on s’est posé sans encombres à Holguin.

En franchissant la porte de l’avion, toujours un moment particulier. La moiteur des tropiques. Cette température si contrastée avec celle qui nous enveloppait 4 heures plus tôt. L’odeur particulière et indescriptible des pays tropicaux. Descente sur le tarmac, passage des douanes, et récupération du vélo. Reste à aller retrouver German, mon taxi qui est devenu mon ami qui m’attends. Il m’explique qu’il ne peut plus me ramener. Que l’aéroport ne permet plus aux gens de venir chercher les gens et que seuls les taxis autorisés par le gouvernement peuvent me prendre en charge. Lui peut prendre mon matériel, mais pas moi, sauf… si je monte mon vélo dans l’herbe et que je fais quelques centaines de mètres pour quitter l’aéroport. Ce que nous décidons de faire.

Dans une scène un peu surréaliste, j’ai donc monté mon vélo en vitesse et je l’ai enfourché. Quel bonheur de rouler en shorts, au soleil, sur un asphalte lisse comme une fesse de bébé… Ça n’aura juste pas duré assez longtemps, mais bon. Demain j’ai un beau programme.

L’après midi c’est ensuite passée bien normalement. J’ai déambulé dans les rues de la ville, mangé mon premier bocadito de jamon, changé de l’argent et acheté une carte pour être en contact avec le monde au nord. Après une visite à mes amis de la famille du taxi, qui m’ont l’un après l’autre demandé de nouvelles de Flora, je suis rentré, j’ai mangé sur le pouce et je me suis couché tôt pour rattraper mon sommeil. Juste avant de me coucher j’ai trouvé dans ma sacoche une petite carte postale écrite par la famille décidément Ariane est une épouse extraordinaire.