Je sais que cette deuxième journée sera difficile. Au programme beaucoup de montées, et surtout la moitié du chemin sur des routes qui ne sont accessibles qu’en Jeep. Fidèle à moi-même, j’ai légèrement sous-estimé la difficulté.
Je pars d’abord le ventre vide jusqu’à Sagua à 10kms. Je cherche une cafétéria et je finis par trouver une vendeuse de sandwiches. J’en avale deux, je lui fais remplir mes gourdes, et je me dirige vers la route de Guantanamo. Dès le début, la route est en mauvais état et très rapidement les montées s’enchaînent. Aucun véhicule de tourisme ne me croise ou double, ce qui me met la puce à l’oreille et annonce le reste de la journée. La nature est incroyable de beauté. La forêt tropicale et les cultures alternent et rafraîchissent l’air. Et moi je monte. Je monte. À un moment quelqu’un me demande si je vais à Guantanamo, et quand je lui dis ma destination il devient incrédule. Je m’entête et je monte. Je monte. Après un bon moment, je finis par rejoindre l’intersection avec la route des crêtes. Un homme me vend un sandwiche et un refresco maison et je suis parti. Fini l’asphalte. Ça descend enfin, pendant quelques centaines de mètres avant de reprendre en montée. À Cuba, quand une montée est en ciment, tu sais que tu vas passer un mauvais quart d’heure. Je croise ensuite un homme à cheval. Il me demande où je vais et me dit qu’il n’y a pas de chemin. Il est encore tôt, alors je fais fi de ses conseils, et je monte. Je monte. Quand ça descend, on ne peut même pas en profiter tellement le chemin est défoncé.
Au bout d’une quinzaine de kms de vallons raides, j’arrive sur un plateau. Les gens que je croise ou à qui je demande de l’eau ne sont plus incrédules mais admiratifs. Le chemin serpente entre les butes, au milieu de la forêt. Le vent en haut (750m) est très fort et parfois me déstabilise mais je continue vaillament. Dans un des villages je cherche à manger et me fais servir une sorte de soupe pour laquelle il ne fallait pas avoir l’estomac fragile. Je l’ai avalée sans rechigner.
Finalement je suis arrivé à Palenque de Yateras. Palenque en cubain signifie à peu près : endroit lointain et difficile d’accès où les esclaves se cachaient. C’est un village où les faciès des gens rappellent leur origines indigènes. Les cubains les appellent même les « indios » comme ils disent les « mulatos » ou les « negros ».
Je passe la nuit dans une casa, probablement illégale, avec douche au gobelet pour faire changement et coupure d’électricité.